Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

undefined

A lire ou à parcourir pour les municipales,

 

Sur : http://www.fondation-abbe-pierre.fr/rml.html

 

Extrait de ce rapport: Quand certains évoquent « la fin des Hlm »...

 

Pourquoi évoquer « la fin des Hlm » alors que l’utilité de ce parc locatif social n’a sans doute jamais été aussi manifeste ? Il peut sembler provocateur de poser cette question alors que le nombre de demandeurs

d’un logement social augmente (1,3 million) et que ce parc de plus de 4 millions de logements où habitent 11 millions de personnes représente souvent la seule solution qui permette à un ménage modeste, dans un contexte de crise profonde, d’accéder à un logement décent et qui garantit une occupation durable.

 

Pourquoi s’inquiéter de l’avenir des Hlm alors que le président de la République et le Premier ministre ont fixé comme objectif de construire 500 000 logements par an dont 120 000 logements sociaux ? Pourquoi s’inquiéter de l’avenir des Hlm alors que l’opinion publique évolue et qu’elle exprime désormais une forte attente vis-à-vis du logement social et qu’une majorité de ménages — y compris des catégories supérieures — a une opinion plus positive du logement social et estime que ses enfants pourront en avoir besoin ?

Le logement apparaît comme une priorité majeure pour les Français et est prioritaire chez les jeunes. Jusqu’à présent, la représentation de l’ensemble des Français était que le logement social est destiné aux ménages très modestes. Les Français affirment qu’il est désormais une nécessité, qu’ils pourraient y avoir recours et que les pouvoirs publics n’en font pas suffisamment au plan national et local.

Si la question de l’avenir des Hlm, voire de leur fin est posée, c’est parce que s’expriment des interrogations sur les performances qu’ils obtiendraient par rapport aux acteurs du secteur concurrentiel, sur le poids qu’ils représenteraient pour les finances publiques en regard de ses performances sociales alors que les opérateurs privés pourraient développer les mêmes à moindre coût (c’est du moins leurs discours ou ceux de leurs représentants).

 

Si cette question est posée c’est aussi parce que s’expriment plus frontalement des menaces, qu’il s’agisse de l’objectif gouvernemental de vendre chaque année 1 % du stock (40 000 logements) et de réduire ainsi l’offre disponible, ou plus directement, des propos de l’Union nationale de la propriété immobilière (Unpi) qui appellent explicitement à la disparition progressive du parc public. Dans l’introduction de la seconde version du Livre Blanc de cette organisation de propriétaires parue en septembre 2007, son président est très explicite : « Je crois que la résolution de la crise du logement passe par une extinction progressive du parc public ». Et comme l’Unpi reconnaît la gravité et l’ampleur de la crise actuelle, son président propose que les organismes Hlm disposent, dans une période transitoire, de logements supplémentaires par « la mise en place de la cession temporaire d’usufruit » d’habitations appartenant à des propriétaires privés. Il n’y a aucune philanthropie à la source de cette proposition mais la prévision d’une baisse des loyers du secteur privé et d’une moindre rentabilité de l’investissement locatif.

Ce faisant, dans un propos qui est par ailleurs faiblement étayé, il accoutume les responsables de la politique du logement à l’idée que le désajustement entre offre et demande est temporaire et justifie des mesures provisoires, ainsi qu’à l’idée que les acteurs privés peuvent contribuer à la fourniture de logements à caractère social.

Le Livre Blanc de l’Unpi cherche à montrer que le développement de la demande de logement social conduit à une impasse si l’on fait le choix de développer le secteur Hlm. Il faudrait, selon ce document, simplement réduire les plafonds pour rapprocher le nombre de ménages éligibles au logement social, du volume du parc social. Par ailleurs, en s’appuyant sur le constat du différentiel de mobilité entre le parc public et le parc privé, l’Unpi souligne que ce dernier produit une offre annuelle 4 fois supérieure à celle qui émane du parc Hlm. « La conclusion s’impose: pour assurer en pratique le droit au logement opposable, c’est principalement sur le parc locatif privé qu’il faut compter ». CQFD. Et l’auteur d’ajouter que s’il ne faut pas construire davantage de logements sociaux, c’est parce que cette solution est incompatible avec les nécessités d’équilibre des finances publiques et en inadéquation avec les aspirations profondes des Français qui préfèrent la propriété à la location.

Si la France comptait plus de propriétaires, « il y aurait ainsi bien moins de candidats au logement social public » et « à terme, il ne doit plus y avoir de parc Hlm » comme il ne doit plus y avoir de pauvres : « je veux que les pauvres deviennent riches pour que la société n’ait plus à s’en occuper, alors que d’autres préfèrent qu’ils restent pauvres pour maintenir leur fonds de commerce ». Si l’on comprend bien, le corporatisme des organismes Hlm serait à l’origine du maintien des ménages dans la pauvreté et la précarité !

 

Une autre position moins provocatrice chemine et est mise au débat. Elle est notamment portée par des organismes et des personnes proches du pouvoir actuel comme le président de l’association Héritage et Progrès.

Cette position consiste non pas à supprimer le parc Hlm mais à donner au logement Hlm un rôle résiduel en lui fixant comme objectif de loger les ménages pauvres (15 % des ménages en regard des normes européennes) et très modestes, soit entre 15 et 25 % des ménages. Pour les tenants de cette position, le logement social doit se spécialiser dans l’accueil des ménages qui en ont le plus besoin et ne peuvent se loger aux conditions du marché. Selon cette logique, il faudrait revenir sur les barêmes qui sont beaucoup trop hauts puisqu’ils englobent 70 % à 75 % de la population et « réserver les Hlm aux pauvres quitte à en faire partir les ménages les plus aisés».

 

Plus généralement, cela s’inscrit dans une approche libérale de la politique du logement dont les orientations sont bien connues. Elle est notamment défendue par les représentants de l’Unpi, comme elle inspire les propos de ceux qui souhaitent remettre en cause la vocation généraliste du parc social. Pour eux, il s’agit :

– de limiter la production de logements sociaux à un niveau inférieur aux 100 000 ou 120 000 logements annoncés (50 000 seraient suffisants),

- d’ouvrir la construction de logements sociaux aux opérateurs privés,

– de favoriser les aides à la personne qui « profitent à ceux qui en ont le plus besoin » au détriment des aides à la pierre,

– de privilégier l’accession sociale à la propriété moins coûteuse pour les deniers publics que la construction de logements locatifs sociaux.

 

Finalement entre la perspective de « la disparition du parc Hlm » et la fin de sa vocation généraliste et universaliste, les positions ne sont pas si éloignées et elles conduisent à s’interroger sur l’avenir de ce parc.

Sachant que le débat ouvert aujourd’hui l’a déjà été à d’autres périodes dans la longue histoire du logement social.

Ce fut notamment le cas au milieu des années soixante-dix, quand, à la suite de l’élection de Valéry Giscard d’Estaing, Raymond Barre a présidé une commission chargée de repenser le financement du logement.

Le rapport publié en décembre 1975, qui allait servir de base à la réforme du financement du logement arrêtée au début de l’année 1977, préconisait la suppression des aides à la pierre pour leur substituer un système d’aides à la personne renouvelé et élargi. De fait, sans que cela soit vraiment explicite, une telle proposition consistait à faire disparaître la spécificité de la production de logements sociaux dans le cadre d’une filière spécifique de financement et à remettre en question l’existence des organismes de logement social puisque ce qui qualifiait le logement social était alors son occupation et la possibilité pour ses occupants de disposer d’une aide à la personne.

 

La réforme de 1977 n’a pas retenu toutes les options du rapport Barre et n’a pas fait disparaître les aides à la pierre mais les a engagées dans un mouvement de décroissance qui s’est poursuivi jusqu’à maintenant.

La question de la disparition, sinon du parc Hlm, du moins de sa spécificité, n’est donc pas vraiment nouvelle et les arguments avancés dans ce sens sont pour nombre d’entre eux empruntés au passé. Mais cette question se pose aujourd’hui dans un contexte radicalement différent.

 

Alors que l’on pouvait imaginer au milieu des années soixante dix que la crise du logement traversée par la France depuis des décennies était résolue, nous sommes aujourd’hui dans une situation de crise du logement, d’une crise d’une autre nature, qui plaide, au moment où l’on vient de reconnaître l’opposabilité du droit au logement, pour que soit posée la question du développement de l’offre de logement à vocation sociale. Ce qui est nouveau aujourd’hui, c’est donc la nature de la crise du logement mais aussi la modification du contexte sociopolitique avec le recul de l’Etat-Providence, l’élargissement de l’emprise du marché dans la production des biens et services et le double mouvement de renforcement des prérogatives européennes et d’affirmation du rôle des collectivités locales dans le domaine du logement.

 

Au-delà de l’interrogation que suscite la croissance très lente du parc Hlm et la diminution de l’offre disponible chaque année du fait de la baisse de la mobilité résidentielle, se pose la question plus fondamentale de l’avenir du logement social. Elle se pose notamment parce que ce n’est pas seulement le parc qui connaît des évolutions incertaines et les organismes qui se trouvent dans l’incertitude mais la notion même de logement social qui est ébranlée et remise en cause. Et cette fragilisation n’est pas conjoncturelle : elle renvoie à un processus qui s’inscrit dans la durée et que les choix dogmatiques des gouvernants accélèrent.

 

Si l’on considère que la spécificité du logement Hlm tient à sa fonction sociale, au mode de financement de ce secteur et à ses acteurs spécifiques, on peut considérer que ces trois « piliers » sont en quelque sorte fragilisés.

 

Le système de production du logement social, qui s’appuie sur une filière spécifique de financement et sur l’outil professionnel que représentent les organismes Hlm pour produire un logement social durable accessible à un large spectre de la population, est aujourd’hui remis en cause. La notion même de logement social devient plus floue et plus incertaine sous l’effet de trois logiques déterminantes : la libéralisation de l’économie, la décentralisation des pouvoirs, les impératifs européens (services d’intérêt général, collecte de l’épargne populaire).

 

Ces trois logiques sont loin d’avoir encore produit tous leurs effets. Il en résulte une situation particulièrement instable pour le logement social et une incertitude concernant son avenir. La situation est donc paradoxale puisque la déstabilisation et la remise en cause du logement social interviennent alors que son utilité sociale est fondamentale pour les ménages pauvres et modestes et qu’il va servir de support majeur à la mise en oeuvre de la loi sur le Droit au logement opposable.

 

Voir aussi:

 Logement : le pouvoir libéral-autoritaire confirme ses orientations inefficaces, injustes et brutales…

Bonne nouvelle : le mouvement HLM résiste pour l’instant aux orientations désastreuses de Sarkozy

 

Logement : à Aubervilliers, le triste bal des hypocrisies

 

Tous propriétaires ! ou : la démagogie libérale-autoritaire en action

Tag(s) : #Niouzes diverses
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :