Aides publiques : que de très justes « compensations », ose le patron du Medef auditionné au Sénat
Poursuite de la commission d’enquête sénatoriale sur les aides publiques, avec l’audition du président du Medef, Patrick Martin, pour qui ces aides ne seraient que la juste compensation pour les tracas administratifs réglementaires et le « coût du travail ».
le 22 avril 2025

Se sont-ils donné le mot ? Les chefs d’entreprises auditionnés par la commission sénatoriale sur les aides publiques déroulent un nouvel élément de langage, non, il ne faudrait pas parler d’aides publiques, mais de « compensation ».
C’est ces termes que Patrick Martin, président du Medef, présente les choses, les aides publiques sont là à ses yeux pour « corriger les effets pervers des législations ou réglementation », prises, estime-t-il, « contre la rationalité économique ». Il donne un exemple, en Allemagne les entreprises bénéficient d’un tarif de l’électricité avantageux, que compensent les ménages allemands, qui la paient, eux, 42 % plus cher qu’en France admet le président du Medef.
Idem dans la bouche de Philipe Salle, PDG d’Atos, auditionné un peu plus tôt pour qui « le Cice ou le crédit impôt recherche ne sont pas des aides, mais un moyen d’atténuer les conséquences très douloureuses du coût du travail en France », qui plus est, déplore-t-il, « avec un contrôle poussé et des dossiers complexes ».
Le patron du Medef défend les aides aux entreprises
Non contente de verser des aides, l’Administration se montrerait tatillonne… Atos a touché en 2023 59 millions d’euros d’aides diverses, toutes fléchées vers les salariés français du groupe assure son PDG, alors même « qu’un ingénieur indien nous coûte cinq fois moins cher qu’un ingénieur français ». Ajoutant « et il travaille 40 heures par semaine ». Atos est passé en deux ans de 110 000 salariés à 80 000, dont la moitié désormais est employée en Inde, en Roumanie ou Pologne.
C’est grâce aux aides aux entreprises que la France « n’est pas un pays de dumping social » assure Patrick Martin, qui brocarde encore l’« illisibilité » de ces subventions. Ce qui ne l’empêche pas d’en réclamer davantage, « les aides à l’industrie représentent 10,5 % du PIB en France, c’est 22 % en Suisse, qui maintient ainsi son tissu industriel ». Le président du Medef prédit même un effondrement à venir de l’apprentissage en France, en raison de la diminution des aides publiques à cette forme d’emploi.
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La structure même du capitalisme des grandes entreprises empêcherait de toute façon tout bougé, suggère Patrick Martin, depuis que « la moitié du CAC 40 est détenue par des investisseurs étrangers ». « L’actionnariat étranger n’est pas patriote », rappelle alors le président de la commission, Olivier Rietmann. « L’actionnaire qui vient développer l’entreprise, c’est devenu un mythe, c’est peanuts, il vient faire de la rentabilité à court terme », renchérit le rapporteur Fabien Gay, (par ailleurs directeur de l’Humanité).
En propos liminaire, le président du Medef s’était livré à une attaque en règle de diverses taxes et impôts. « Il faut regarder la performance des impôts, l’IFI (un succédané édulcoré de feu l’impôt sur la fortune, limité à la propriété immobilière, NDLR) a un impact négatif sur l’investissement locatif ». Taxer moins, aider encore plus, le prédécesseur de Patrick Martin à la tête du Medef avait promis avec cette politique « un million d’emplois ». On les cherche encore.