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Populisme économique : les trois raisons d’un succès

Christian Chavagneux

23/11/2016

Le Brexit et Trump ont passé la barre. Les pronostics des gens sérieux ayant été à chaque fois déjoués, faut-il s’attendre demain à voir une Marine Le Pen ou un autre leader populiste européen arriver au pouvoir ? Ou au moins prendre une place telle qu’il soit en position de faiseur de roi ou d’être le centre du débat politique ? Certes, chaque pays obéit à des spécificités nationales et suit une trajectoire historique qui lui est propre. Mais le spectre du populisme, celui du chef autoritaire, de la glorification d’un peuple supposé unifié et qu’il faut protéger des étrangers, hante l’Europe continentale après s’être emparé des rênes dans les pays du capitalisme anglo-saxon. Il faut donc aussi chercher des explications générales.

L’économie n’explique pas tout

La première, celle qui revient le plus souvent, trouve sa source dans l’économie. La mondialisation et le progrès technique, la montée de la précarité et des inégalités laissent sur le côté un nombre croissant de personnes. Qui finissent par se rebeller en voyant dans les séductions populistes un remède à leurs problèmes.

Si cette lecture contient une part de vérité, elle reste insuffisante. Les pays à plus fort chômage ne sont pas forcément plus ouverts au populisme. Et Donald Trump a obtenu la majorité dans des circonscriptions où le chômage avait le plus baissé. Les sociétés les plus égalitaires, par exemple la Suède ou le Danemark, connaissent également une montée de ce type de partis.

L'économie et le refus des évolutions sociétales nourrissent le populisme

Le sociologue Ronald F. Inglehart et la politiste Pippa Norris ajoutent une dimension culturelle. Les jeunes générations de nos sociétés contemporaines marquent une acceptation croissante des étrangers et des migrants, de la vie en couple et du mariage de personnes de même sexe ; ils revendiquent une égalité homme-femme, etc. Les hommes, vieux, aux valeurs traditionnelles, sont bousculés par ces évolutions sociétales et pensent trouver un équilibre dans ceux qui leur servent un discours fondé sur la tradition et un passé mythifié.

De fait, l’âge apparaît comme un bon prédicteur du vote populiste, qui trouve également plus de soutien chez les hommes que chez les femmes. Mais aussi davantage chez les « majorités ethniques » des différents pays – en gros les Blancs – que chez les minorités, permettant à Trump le machiste de recueillir la majorité des voix des Américaines blanches. La question raciale reste très présente dans nos sociétés et les populistes s’en servent.

Le rôle du libéralisme

Enfin, une lame de fond politique est également à l’œuvre. Dans La grande transformation, publié en 1944, Karl Polanyi explique que la libéralisation des économies et la marchandisation des sociétés finissent toujours par provoquer un contre-mouvement visant à recréer de la protection.

Le libéralisme finit par susciter un contre mouvement politique

Mais rien n’est écrit sur la forme que cela prendra. Cela peut être un Donald Trump ou un Alexis Tsipras, un Franklin Roosevelt ou un Benito Mussolini. Les circonscriptions démocrates où Bernie Sanders est arrivé en tête n’ont pas voté pour Hillary Clinton, qui a connu une chute importante du nombre de voix par rapport à celles récoltées par Barack Obama.

Lorsque la gauche, qui devrait être le débouché naturel du contre-mouvement, glisse vers la défense du libéralisme, elle ne mobilise plus et fait gagner les autres. Une gauche de droite provoque toujours des catastrophes historiques.

Christian Chavagneux

Tag(s) : #démocratie
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