Les dirigeants des pays les plus puissants se retrouvent au Japon alors que guerre commerciale et dumping fiscal ou environnemental menacent une conjoncture très fragile.
Le G20 qui s’ouvre ce vendredi à Osaka au Japon devrait être celui de la coopération et d’une audace multilatérale inédite pour faire face aux menaces qui affectent la conjoncture mondiale ou (et) la question climatique. Il n’en sera rien. Telle est la volonté de Donald Trump. Le représentant du pays le plus puissant de la planète a annoncé en effet la couleur. Il est déterminé à appliquer à plein une stratégie du deal qui consiste à jouer de tous les instruments.
La guerre commerciale qu’il a déclenchée contre la Chine, coupable de talonner désormais de trop près les États-Unis sur le terrain économique, ne saurait déboucher sur un compromis que si ce dernier bénéficie aux entreprises américaines et freine l’expansion des firmes chinoises. « L’économie de la Chine s’effondre, ils veulent un accord », a martelé le locataire de la Maison-Blanche sur le ton d’un joueur de poker convaincu d’avoir tous les atouts dans sa manche, empreint aussi d’une forte solennité martiale.
Les dégâts occasionnés par le dollar
La démonstration de puissance est appuyée par la détermination à user d’un rapport de forces militaire qui penche sans discussion en faveur du Pentagone. Et le président des États-Unis s’efforce d’en fournir la preuve par les travaux pratiques quand il brandit au même moment la menace de déclencher le feu d’une guerre « chaude » avec l’Iran. Au mépris du cataclysme que pourrait engendrer un tel conflit au Moyen-Orient et bien au-delà.
La conjoncture mondiale, déjà passablement affectée après le léger rebond enregistré en 2017 et 2018, pourrait constituer l’ultime victime de cette fixation à restaurer une pleine domination des États-Unis en jouant de toutes les cartes dont dispose l’Oncle Sam. Un retournement spectaculaire affecte déjà de plein fouet nombre de pays dits émergents. L’Argentine, le Brésil, la Turquie, l’Afrique du Sud connaissent les pires difficultés, voire la récession. Eux qui se sont lourdement endettés en dollars sont étranglés par le renchérissement du billet vert et l’augmentation des taux d’intérêt de la réserve fédérale états-unienne. Ce qui ne fait que souligner les dégâts occasionnés par cet autre instrument de domination de Washington qu’est sa monnaie. Le dollar, qui contribue tant aujourd’hui à tirer vers le bas les pays émergents, n’a-t-il pas été élevé au rang de monnaie commune mondiale ?
La zone euro est loin d’échapper au ralentissement général. L’institut de conjoncture IFO a relevé ainsi au début de la semaine que les groupes allemands continuent de voir freinées leurs exportations. Ce qui pèse en conséquence toujours davantage sur l’activité du moteur germanique de la zone. Avec une croissance allemande qui devrait quasiment stagner en 2019 et en 2020. Et si Donald Trump privilégie le front chinois dans la guerre commerciale, il ne s’en est pas moins répandu bruyamment, avant ce G20, sur la nécessité de résorber aussi l’autre très gros déficit commercial états-unien, avec l’Allemagne. Et d’accuser Berlin, contre lequel il a brandi à nouveau la menace de relever ses droits de douane, d’être un « partenaire défaillant ».
Ces rodomontades semblent être partie intégrante d’une stratégie destinée à torpiller l’Union européenne et ses velléités de coopération. Une offensive explicite est ainsi dirigée contre une politique agricole commune présentée comme une machine à ériger des barrières déloyales pour les mastodontes de l’agro-industrie américaine. Le locataire de la Maison-Blanche fait monter la pression sur Berlin pour marchander le retrait de ses menaces tarifaires sur les productions industrielles made in Germany à la conclusion d’un accord ouvrant l’accès des firmes américaines aux marchés agricoles et agroalimentaires européens. Un deal dont le principal perdant serait la France, qui reste l’un des champions du secteur sur le Vieux Continent. Paris semble demeurer dans l’expectative, bien que les droits de douane décrétés récemment sur les vins français constituent l’un des signaux annonciateurs de cette offensive.
De quoi ramener les postures du président Macron pour le climat ou le multilatéralisme avant l’ouverture de ce sommet à leur juste dimension. Alors même que des coopérations internationales inédites apparaissent toujours plus indispensables pour faire face aux défis auxquels est confrontée l’humanité pour se prémunir des guerres, classiques ou commerciales, comme pour enrayer le réchauffement climatique.