Projets de loi organique et ordinaire relatifs au Défenseur des droits
Intervention générale
Deuxième séance du mercredi 16 février 2011-Assemblée Nationale
M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Amiable.
Mme Marie-Hélène Amiable. Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, avec ce projet de loi organique, nous abordons enfin le fameux volet citoyen de la réforme constitutionnelle. C’est en son nom, rappelez-vous, qu’il fallut avaler toutes les autres couleuvres, nombreuses et indigestes. Pas un amendement, pas un article n’était discuté en juillet 2007 sans qu’on brandisse en même temps cet argument : les citoyens auront plus de pouvoirs. On en attend encore les effets réels. À vrai dire, on commençait à s’impatienter.
En fait, le retard avec lequel ces outils citoyens ont été mis en place en dit long sur vos priorités. Les lois organiques découlant de la réforme constitutionnelle qui visaient à permettre au Président de la République de nommer les PDG des entreprises publiques, aux ministres de retrouver leur siège de député ou encore à réformer le travail parlementaire en muselant l’opposition ont été présentées avec une rapidité suspecte ! Comme vous nous y avez habitués, il y a là deux poids, deux mesures !
Près de trois ans après l’instauration du droit de saisine du Conseil constitutionnel par les citoyens – droit au rabais – la promesse du référendum d’initiative populaire qui devrait bientôt arriver, nous abordons ce fameux Défenseur des droits qui nous été « vendu » comme l’organe mettant le citoyen au centre des débats.
Nous avons rappelé, tout au long des débats, que nous n’étions pas contre le principe d’un ombudsman à la française, mais que nous avions la crainte que ne se disperse l’essence même des autorités administratives existantes, aussi diverses dans leur fonctionnement que dans leurs missions. Cette crainte, à la lumière des différentes lectures qui ont été faites de ce texte, s’avère fondée tant leurs missions se retrouvent délayées dans un grand tout bien trop vaste. En lieu et place d’un outil intelligent et collégial, vous êtes en train de dessiner les contours d’une espèce de colosse administratif, d’une usine à gaz difficilement gérable.
Une seule question aurait dû sous-tendre nos travaux, à savoir : quels outils mettre en place afin que les droits fondamentaux et les libertés publiques de nos concitoyens soient le mieux respectés, voire défendus ? Au lieu de cela, le mode de nomination et le mode de fonctionnement choisis sont symptomatiques du fossé qui s’élargit entre citoyens et chose publique et de la mainmise du seul défenseur nommé par le chef de l’Etat. L’omnipotence qu’implique cette nomination aurait pu être, éventuellement, contrecarrée par une collégialité réelle, gage d’indépendance et de libertés. Il n’en est rien puisque les pouvoirs, les cadres d’action et les missions ne sont pas suffisamment partagés. Dans ces textes, au contraire, se dessine un pouvoir arbitraire du défenseur.
Marie-Hélène Amiable
Députée des Hauts de Seine
Maire de Bagneux