Environ 80 personnes hier à J. Jaurès, ce qui montre l’intérêt du thème mais aussi qu’il existe des marges pour la mobilisation, d’ici la manifestation de dimanche. Malgré des délais courts pour mobiliser contre le traité après les congés d’Eté. Une réunion riche, avec des intervenants de qualité qui ont d’emblée bien cadré le sujet à la fois sur les plans économique et politique.
Le sujet est-il lié à la sortie éventuelle de l’euro, comme le voudraient à la fois Hollande-Ayrault-Cohn-Bendit et les autres, l’extrême gauche, sans parler de toute la droite, souverainiste ou pas. Evidemment non, l’enjeu est de transformer l’Europe en la faisant sortir de son libéralisme congénital devenu mortifère pour le modèle social européen. Le Royaume-Uni, hors zone euro, connaît en ce moment la même problématique.
La politique proposée aujourd’hui est apparemment absurde. Nous savons très bien, et beaucoup d’autres, de tous horizons, également, que l’austérité renforcée à laquelle nous conduit le traité va creuser les déficits publics et augmenter la dette, et non les réduire. La presse est pleine d’articles rédigés par des économistes pour l’expliquer[1]. Certains hommes politiques bien en cour le reconnaissent, mezzo voce[2]. Les efforts imposés aux peuples européens par l’augmentation des impôts, la baisse des prestations sociales, des salaires et la casse des services publics nationaux et locaux[3] ne donneront pas les résultats escomptés car le cycle de récession, voire de dépression ainsi alimenté jouera à l’encontre des objectifs affichés.
Comme les promoteurs du traité ne sont pas des idiots, il convient de s’interroger sur les objectifs réels de choix en réalité éminemment politiques. Il y a certes l’influence de l’ "ordo libéralisme"[4] de la droite allemande. Il s’agit surtout de faire reculer le modèle social européen, résultat d’années et d’années de luttes sociales et démocratiques, pour ajuster structurellement l’Europe à la donne capitaliste mondiale. Après trente années de financiarisation de l’économie qui de diverses manières (baisses d’impôts, pression sur les salaires, précarisation de l’emploi, hypertrophie du crédit, etc.) ont conduit à creuser le(s) trou(s). Après transfert, via la crise, en Europe et aux Etats-Unis des difficultés privées sur les finances publiques, l’heure est venue, en Europe de faire passer la pilule auprès des peuples : « soit vous acceptez les reculs sociaux, soit on ne s’en sort pas »…On comprend pourquoi L. Parisot signe des deux mains, pourquoi la CGT, mais aussi la Confédération européenne des syndicats, se rebiffent, avec les actions menées dans divers pays le 9 octobre.
Naomi Klein, politologue américaine, a dénommé cette approche « La stratégie du choc ». Elle n’est pas nouvelle dans l’histoire[5]. Il s’agissait de Bush fils, à l’époque…Ce qui va être décisif ici sera le consentement, ou plutôt le non-consentement, des peuples.
De ce point de vue, les luttes sont déjà de niveau élevé dans les pays du sud : Grèce, Espagne, Italie, Portugal. Des pays comme les Pays-Bas, la Belgique ou l’Allemagne connaissent des débats contradictoires beaucoup plus intenses sur ces sujets que ce que nous en montrent la plupart des médias nationaux.
En France, que faire ?
Ils veulent à tout prix éviter un référendum populaire car ils savent que la réponse serait non. La lutte pour un référendum et celle pour le rejet du traité constituent donc une même lutte.
La manifestation de dimanche prochain sera évidemment décisive. Si le niveau de participation est élevé, la détermination grande, l’impact sera fort. Pour la préparer, chacun peut convaincre autour de lui, notamment en s’appuyant sur la qualité des arguments développés dans une réunion comme celle d’hier soir à Malakoff. A l’entreprise, dans les quartiers. Dans les luttes syndicales.
Mais l’action ne s’arrêtera pas dimanche soir. Il conviendra notamment d’intervenir auprés des parlementaires. Trois votes importants sont prévus : la ratification du traité, la loi organique qui permet d’appliquer le traité en France, le projet de loi de finances 2013
La droite votera globalement pour un texte rédigé par Merckel et Sarkozy (le texte n'a pas changé d'un iota et le pacte de croissance hollandais est de détail) ainsi que pour la loi organique. Au PS et à EELV, vous aurez les oui-oui-oui, les non-oui-oui, les non-non-oui, y aura-t-il des non-non-non ? Il faudra faire le décompte précis. Attention au claquage musculaire et à la fatigue intellectuelle pour les plus contorsionnistes…ceux qui ne ratifieront pas le traité mais voteront pour la politique qui en découle.
Au Front de gauche, les parlementaires voteront, en toute cohérence, trois fois non, pour contribuer à la sortie progressive de l’Europe du libéralisme.
La vraie chance de l’Europe au 21ème siècle est là, et dans les organisations politiques et sociales qui proposent un autre chemin, sur l’ensemble du continent.
Voir Assemblée citoyenne de Malakoff: non à l'austèrité, non au traité
[1] Voir par exemple, le numéro d’octobre d’Alternatives économiques, journal de gauche, dont la couverture s’intitule « Rigueur, l’overdose »
[2] Le théme étant : il ne faut pas le dire, les « marchés » vont immédiatemment nous le faire payer ;
[3] Un rapport récent de l’Inspection génrale de Finances préconise de mener à leur terme les actions en cours de la RGPP sarkozyste, et d’étendre aux collectivités locales la « RGPP de gauche » ;
[4]Cf. Wikipedia, http://fr.wikipedia.org/wiki/Ordolib%C3%A9ralisme
[5] Rappelon-nous Vichy, par exemple, dans l’histoire française: choc de la défaite/révolution nationale;