http://www.humanite.fr/Pour-le-gouvernement-l-enfance-ne-merite-plus-de-defenseur
La Défenseur des enfants, Dominique Versini, réagit à la décision du gouvernement de supprimer sa mission dans le cadre de la révision constitutionnelle.
Elle a été « choquée » d’apprendre par hasard la suppression de sa mission dans le cadre de la révision constitutionnelle : ancienne secrétaire d’état chargée de la Lutte contre la précarité et l’exclusion dans les deux gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, Dominique Versini a été nomméeDéfenseure des enfants le 28 juin 2006. Ses attributions, ainsi que celles du Médiateur de la République et de la Commission nationale de déontologie et de sécurité (CNDS) seront désormais celles du futur Défenseur des Droits, selon les prérogatives qui ont été déterminées par un projet de loi organique voté en Conseil des ministre le 9 septembre.
Comment avez-vous réagi à l’annonce de la suppression du Défenseur des enfants ?
Dominique Versini. Avec beaucoup de colère et d’incompréhension. Notre institution a appris par hasard qu’elle était rayée de la
carte. Non seulement je ne m’y attendais pas, non seulement il n’y a pas eu de groupe de travail, mais on ne m’a pas appelée - on ne m’a d’ailleurs toujours pas appelée. Mon interlocuteur, c’est
le Président de la république. J’ai été nommée par décret présidentiel. Certes il s’agissait de Jacques Chirac mais la fonction est une continuité. Je suis indépendante, je ne relève,
hiérarchiquement, d’aucune autorité administrative ni politique. Je ne peux relever et discuter, échanger, qu’avec le Président de la République. L’affaire dépasse maintenant l’institution, de
nombreuses personnes en France, associations, professionnels et politiques se soulèvent en s’étonnant qu’au moment du vingtième anniversaire de la Convention internationale des droits de
l’Enfant, le gouvernement n’a pas trouvé d’autre idée que de supprimer le Défenseur des enfants.
Vos prises de position peuvent-elles être à l’origine de cette décision ?
Dominique Versini. Si c’est le cas on ne m’en a jamais fait part. J’ai vraiment fait mon travail et juste mon travail. Je me suis
contentée de donner des avis conformes à la Convention internationale des droits de l’enfant que la France a ratifiée. J’ai toujours eu conscience d’être à la tête d’une autorité de la
République. Je n’ai jamais été dans un discours politicien ni militant. Mais je ne pouvais pas dire que c’était bien de mettre des enfants dans des centres de rétention administratives alors que
ce n’est pas du tout leur intérêt supérieur. Après si cela a déplu je n’en sais rien. On ne me l’a jamais dit…
Défenseur des enfants, médiateur de la République, CNDS : avez-vous le sentiment que le gouvernement cherche à faire taire des institutions gênantes ?
Dominique Versini. Si elles sont réunies, plus aucune ne parle de manière distincte. C’est une façon de diluer leur effet. Quand
moi, Dominique Versini, je parle, je suis une personne identifiée et incarnée. Après il y aura un Défenseur des droits qui parlera aussi bien des droits des commerçants, des droits des gens au
regard des impôts… Et puis de temps en temps il parlera des droits des enfants. Alors que pour nous il s’agit d’une mission à temps plein. Qui plus est une mission voulue par le Parlement en 2000
et votée à l’unanimité. Le Défenseur des enfants est celui qui défend les enfants et leurs garanties en matière de droits et de libertés publiques. On va avoir bientôt une grande réforme de la
Loi sur la justice des mineurs, qui va dire quelque chose ? Est-ce que vous avez entendu une haute autorité administrative dire quelque chose ? de façon percutante ? Il ne suffit
pas de rédiger un document administratif. Nous, citoyens, sommes tous concernés par l’avenir de nos enfants.
Entretien réalisé par Anne Roy
Voir aussi Pour le
respect par l’Etat des droits de l’enfant et de sa famille