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Lu sur Gaza : « La mobilisation ouvre incontestablement des brèches », l'analyse de Marc Botenga sur le réexamen de l’accord d’association UE-Israël - L'Humanité

Gaza : « La mobilisation ouvre incontestablement des brèches », l'analyse de Marc Botenga sur le réexamen de l’accord d’association UE-Israël

L’eurodéputé Marc Botenga, qui a mené, en novembre 2024, une mission d’observation en Cisjordanie occupée, est connu pour ses prises de position fortes au sein du Parlement européen sur la Palestine. Il analyse pour l’Humanité la dynamique diplomatique dans laquelle est engagée l’Union européenne.

le 21 mai 2025

Lina Sankari

Comment analyser le mouvement dans lequel s’engage l’Union européenne (UE) avec le réexamen de l’accord d’association avec Israël ?

La première chose à souligner, c’est le moment dans lequel nous nous trouvons. Les mobilisations n’ont jamais été aussi soutenues sur l’ensemble du continent. L’accroissement de la solidarité avec la Palestine se combine à l’indignation vis-à-vis de la position européenne. Ce sont bien les pays où le mouvement de solidarité avec la Palestine est le plus fort qui prennent les positions les plus fortes. Cette mobilisation ouvre incontestablement des brèches.

 

Qu’est-il désormais possible quand, il y a un mois, il semblait inenvisageable d’évoquer une remise en cause de cet accord d’association entre l’UE et Israël ?

Des images terribles nous parviennent, l’ensemble des agences des Nations unies évoquent les pires massacres, un nettoyage ethnique, des actes de génocide. On apprend que 14 000 enfants palestiniens risquent de mourir de faim non pas du fait d’une famine liée à des causes naturelles ou pour un manque d’aide, mais bien parce qu’Israël bloque de manière délibérée les camions humanitaires.

Face à cela, l’Union européenne envisage d’enquêter sur une potentielle violation des droits humains ! C’est presque une farce. Ils n’annulent pas l’accord d’association, ils ne le suspendent même pas. Ils disent qu’ils lancent une procédure avec moult prudence. Il y a un décalage important avec la réalité. Si ce signal avait été envoyé à Israël il y a dix-neuf mois, des dizaines de milliers de morts auraient potentiellement pu être évitées.

 

Le réexamen de l’accord d’association UE-Israël est-il suffisant ?

Alors que 14 000 enfants risquent de mourir, que des dizaines de milliers d’innocents ont été tués, que nous sommes face à un nettoyage ethnique, à une annexion assumée par le gouvernement israélien, que des mandats d’arrêt ont été émis par la Cour pénale internationale et que la Cour internationale de justice alerte sur un risque de génocide, l’Union européenne envisage d’interroger la possible violation des droits humains… C’est kafkaïen. Pendant ce temps, le transfert d’armes et de fonds publics vers Israël continue.

Des sanctions sont-elles nécessaires en plus d’une éventuelle suspension de l’accord ?

Il faut d’abord suspendre l’accord, ce qui n’est pas encore fait. Hier, la vice-présidente de la Commission européenne, Kaja Kallas, n’a pas parlé de suspension. En 2024, la Cour internationale de justice a jugé l’occupation illégale et créé une série d’obligations pour les États tiers. Cela signifie qu’ils ne peuvent plus contribuer à cette occupation de manière directe ou indirecte. Ils ont désormais des obligations légales et, pour l’heure, les Vingt-Sept, membres des Nations unies, n’y répondent pas.

N’y a-t-il pas in fine, de la part de l’UE, une volonté d’envoyer un signe à la société israélienne elle-même afin qu’elle augmente la pression sur Benyamin Netanyahou ?

Je ne pense pas. Là encore, ce signal aurait pu être envoyé il y a dix-neuf mois. S’il s’agit de signal symbolique, certains pourraient même dire qu’on arrive avec vingt ou quarante ans de retard. Aujourd’hui, il y a une question très forte qui se pose au sein des États membres et l’UE doit donner l’impression d’agir un minimum.

Je me réjouis toutefois qu’au sein de la société israélienne, de plus en plus de gens se rendent compte des desseins du gouvernement. Au Parlement israélien, Yaïr Golan, le président des Démocrates, a accusé l’exécutif d’avoir pour hobby de « tuer des bébés » palestiniens. Il faut s’imaginer à quel degré de déshumanisation des Palestiniens nous en sommes arrivés.

Comment envisager la suite ?

Il faut continuer de mettre la pression non seulement sur les institutions mais sur chacun de nos pays. S’il y a bien une chose que nous apprenons de cette séquence, c’est que la mobilisation peut payer. On le voit au Royaume-Uni, un fervent soutien d’Israël depuis sa création. Même là-bas, le gouvernement est obligé de prendre des sanctions contre les colons et de mettre en pause le traité de libre-échange en cours de négociation avec Israël.

En France également, Emmanuel Macron annonce une reconnaissance de l’État palestinien. C’est très bien en soi mais la priorité reste de garantir que le droit international soit respecté, et que les Palestiniens disposent de leur droit à l’autodétermination et puissent exister. Ce qui est en jeu aujourd’hui, c’est l’effacement d’un peuple. Il faut se rendre compte de l’urgence dans laquelle nous sommes. Il y a encore beaucoup de chemin à faire parce que ni Macron ni l’UE n’imposent aujourd’hui de vraies sanctions à Israël.

 

Tag(s) : #Gaza
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