
L'éditorial de Maud Vergnol. Parmi les profiteurs de la crise, l’un se distingue comme le champion toutes catégories : Paul Hudson, PDG de Sanofi, et son projet « Play to win » (oui, oui, vous avez bien lu « Jouer pour gagner »), qui consiste à licencier 1 700 personnes
Du sang et des larmes. Voilà ce à quoi nous prépare le nouveau gouvernement, en ordre de bataille pour nous faire avaler l’amère potion post-Covid, catalyseur d’une crise économique qui avait débuté bien avant l’épidémie. « Récession historique », « risque de 2 millions de chômeurs supplémentaires »… derrière les chiffres qui claquent, des visages défaits, des avenirs compromis, des familles paniquées. Pas un jour ne passe sans l’annonce de réduction d’activité, de fermetures de sites et leurs lots de licenciements. Un paysage idéal pour les nouveaux bandits de grand chemin et leur chantage à l’emploi (« accords de performance » dans le jargon).
Parmi les profiteurs de la crise, l’un se distingue comme le champion toutes catégories : Paul Hudson, PDG de Sanofi, et son projet « Play to win » (oui, oui, vous avez bien lu « Jouer pour gagner »), qui consiste à licencier 1 700 personnes, dont 1 000 dans l’Hexagone, alors que son entreprise vient de verser, fin mai, 4 milliards d’euros à ses actionnaires, une somme rondelette qu’ils doivent en grande partie aux remboursements de la Sécurité sociale. Cerise sur le gâteau, le géant pharmaceutique a bénéficié de 1,5 milliard d’euros d’aides publiques depuis dix ans. Loin de siffler la fin de la récréation, c’est chez Sanofi qu’Emmanuel Macron avait fait le déplacement pour annoncer un nouveau jackpot de 200 millions d’euros pour aider l’industrie pharmaceutique.
Aussi caricatural et emblématique soit-il, le cas Sanofi est loin d’être une exception. Comme nous le démontrons aujourd’hui dans nos colonnes, bien d’autres groupes saisissent l’aubaine de la crise sanitaire pour licencier à tour de bras en dépit de juteux profits ou des deniers publics qu’ils encaissent. Autant d’argent qui ne servira pas aux PME/TPE qui, elles, vont payer la crise au prix fort. En avril, Bruno Le Maire avait appelé du bout des lèvres les entreprises à « modérer leurs dividendes ». On sait ce qu’il en fut. Encore un petit effort, Monsieur le ministre de la Relance…