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ASSEMBLEE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIEME LEGISLATURE

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COMPTE RENDU INTEGRAL

PROJET DE LOI DE FINANCEMENT

DE LA SECURITE SOCIALE POUR 2008

3e séance du vendredi 26 octobre 2007

Défense d'amendement

de Mme Jacqueline FRAYSSE

Députée des Hauts de Seine

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M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n° 209.

Mme Jacqueline Fraysse. Notre amendement n° 209 propose de supprimer cet article qui a pour ambition de faire payer de nouvelles franchises aux malades, comme plusieurs de mes collègues l’ont expliqué. Article essentiel car emblématique du choix de société du Gouvernement et de la majorité – car c’est bien de cela qu’il s’agit.

Tout au long du débat sur le financement de la protection sociale, nous avons vu, madame la ministre, que vous refusiez de taxer les produits des placements financiers, et que la majorité avait reconduit les exonérations patronales pourtant à l’origine d’un manque à gagner considérable pour le financement de la sécurité sociale. Vous nous expliquez à présent qu’il y a des pistes à explorer : explorons déjà celle-ci ; elles est simple. La Cour des comptes estime à 3 milliards d’euros la somme qui pourrait ainsi revenir dans les caisses : voilà une piste concrète et intéressante.

Non contente de ces dispositions en faveur des plus aisés, vous avez poursuivi dans cette logique injuste en imposant la CSG aux personnes partant en préretraite. Avec les franchises présentées dans cet article, on peut dire que vous enfoncez le clou. En effet, le principe fondateur de la sécurité sociale – je le redis car la pédagogie, c’est la répétition – est la solidarité : chacun cotise selon ses moyens. Les personnes les plus modestes cotisent peu et les plus aisées davantage. Chacun reçoit selon ses besoins – on ne choisit pas d’être malade, que l’on soit riche ou pauvre – ; enfin, les bien-portants paient pour les malades.

Or la mise en place de franchises remet en cause ce principe qui honorait notre pays. Comme la TVA, les franchises ne tiennent pas compte des revenus. Elles s’appliquent de la même manière au smicard et au fils Bolloré, à l’étudiant et au PDG. Vous qui êtes si attachée à l’équité et à la justice, avouez que ces personnes n’ont pas les mêmes revenus et qu’il est indigne de leur demander d’acquitter la même franchise.

Par ailleurs, toujours en rupture avec le principe de solidarité, ce sont les malades qui vont payer pour les malades. Permettez-moi d’énumérer quelques-unes des catégories de personnes auxquelles s’appliquera cette mesure : les invalides et les victimes de guerre ; les patients atteints d’affection de longue durée ; les bénéficiaires d’une pension d’invalidité ; les accidentés du travail et les victimes d’une maladie professionnelle – alors que la loi prévoyait la gratuité des soins pour ces personnes et une prise en compte par la branche accidents du travail et maladies professionnelles financée par les entreprises : les franchises font donc peser les conséquences des accidents du travail sur les salariés qui en sont les victimes et non sur les entreprises, pourtant responsables devant la loi – ; les bénéficiaires du minimum vieillesse – en plus des taxations sur les préretraites que j’évoquais – ; les titulaires d’une allocation adulte handicapé ; les bénéficiaires de l’aide médicale d’État. Non seulement le Gouvernement ne fait pas de distinction entre les plus aisés et les plus démunis, mais il n’en fait pas davantage entre les malades et les bien-portants. Et le comble, c’est que les personnes qui, aux dires du Gouvernement, devraient profiter de ces franchises – c’est-à-dire celles qui sont atteintes par la maladie d’Alzheimer, le cancer ou qui sont en soins palliatifs – devront les payer comme les autres !

C’est la politique du chacun pour soi : voilà la règle ! Et l’on en connaît les conséquences : si vous avez de l’argent, vous serez soigné et bien soigné, car vous pourrez vous payer une bonne assurance; si vous n’avez pas d’argent, eh bien tant pis pour vous !

Nous savons tous, en effet, que ces mesures limitent l’accès aux soins des plus démunis.

Chacun pour soi, c’est le projet de société de la droite : les personnes qui ont les moyens continueront de consommer et de dépenser plus ; les autres – tant pis pour elles ! – resteront sur le bord de la route.

C’est une formidable régression au regard du préambule de la Constitution.

Comment pouvez-vous abandonner ainsi des principes fondamentaux pour récupérer 850 millions d’euros, au lieu de récolter trois milliards, comme vous y invite la Cour des comptes ? C’est grave !

Je conclus donc en disant que contrairement à ce qu’avait prétendu l’UMP dans son programme électoral, ces franchises vont s’ajouter aux autres déremboursements, au lieu de s’y substituer.

Nous n’avons décidément pas la même vision de la solidarité, que vous abandonnez au profit de la loi du marché, la fameuse concurrence libre et non faussée, proche de la loi de la jungle. Nous refusons cette logique, et c’est pourquoi nous avons déposé cet amendement de suppression sur lequel, compte tenu de son importance, nous demandons un scrutin public. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)

 

Tag(s) : #Tracts, déclarations et pétitions
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