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Lu sur Anicet Le Pors
Le CNR inspirant des nationalisations de grande ampleur

Sous le titre « 120 ans 120 unes  120 regards » l'Humanité a publié un superbe album qui comme l’indique le titre fête les 120 ans d’existence du journal en reproduisant 120 unes particulièrement significatives brièvement commentées par 120 personnalités qui réagissent au thème dominant de chacune de ces pages. On publie ci-dessous l’une d’elles que l’on m’a demandé d’évoquer. Il s’agit de la réunion d’un comité central du PCF consacré à la mise en œuvre des mesures immédiates d’application du programme du CNR.

« Il s’agit de défaire méthodiquement le programme du CNR ». C’est l’objectif que se fixa Denis Kessler, dirigeant du Mouvement des entreprises de France (MEDEF).  Et de préciser : « Le modèle social français est le produit du Conseil national de la Résistance. Un compromis entre gaullistes et communistes » (Challenges, 4 octobre 2007).  Il nota  les chantiers à déconstruire : «  les caisses de sécurité sociale, le statut de la fonction publique, l’importance du secteur public productif et la création de grandes entreprises françaises nationalisées, le conventionnement du marché du travail, la représentativité syndicale, les régimes complémentaires de retraite, etc. ». Le représentant du patronat a a ainsi reconnu la grande portée des réformes entreprises après la Libération dans le cadre du programme du CNR. Un hommage du vice à la vertu en quelque sorte.

En estimant que  l’opération devrait être méthodiquement conduite, le patronat l’inscrivait nécessairement dans la durée. Comme nous l’indique la une de l’Humanité du 2 septembre 1945, le parti communiste appela dès la fin de la guerre au rassemblement pour la mise en œuvre des mesures immédiates prévues par le programme. Mais, au-delà, le programme inspira, lui aussi dans la durée, des transformations démocratiques importantes, telles que des nationalisations de grande ampleur. C’est ainsi que le Préambule (toujours en vigueur) de la constitution de 1946 décida que « Tout bien, toute entreprise, dont l’exploitation à ou acquiert le caractère d’un service public national ou d’un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité ». La question de la propriété publique fut encore  essentielle lors de l’élaboration du Programme commun de la gauche de1972 prévoyant la réalisation d’un « seuil minimum de nationalisation » sous  une affirmation qui dominait alors le débat des années 1970 : « La où est la propriété, là est le pouvoir ! ». Slogan que le MEDEF lui-même ne saurait contester.

Le programme du CNR traita dans le même esprit la question institutionnelle. La France en est un véritable laboratoire : une quinzaine de constitutions en un peu plus de deux siècles. Les conditions étaient alors réunies pour l’élaboration d’une nouvelle constitution : un rejet général des dispositifs antérieurs, un large consensus en faveur d’un régime parlementaire, un évènement majeur, la guerre, ouvrant la voie à un débat sans trop de présupposés. Les forces progressistes disposaient aussi d’une référence consacrée, la constitution de 1793, résolument révolutionnaire, permettant, par exemple, de soumettre aux assemblées primaires des départements des textes dits de « loi proposée », et créant un droit à l’insurrection « quand  le gouvernement viole les droits du peuple ». C’est d’ailleurs avec à l’esprit cette constitution et le programme du CNR, que le comité central du parti communiste adopta en décembre 1989 à la suite de mon rapport, un « projet constitutionnel » (1) pour célébrer le bicentenaire de la Révolution française. 

  • (1)  Le  projet constitutionnel du PCF, l’Humanité, 18 décembre 1989. 
Tag(s) : #Humanité
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