Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Lu sur Pacte de stabilité : avant le débat à l'Assemblée, la gauche ne désarme pas contre l'austérité - L'Humanité (humanite.fr)
Pacte de stabilité : avant le débat à l'Assemblée, la gauche ne désarme pas contre l'austérité

Le gouvernement présente ce lundi aux députés son programme de stabilité. Celui-ci prévoit une trajectoire des dépenses publiques qui permette de faire baisser le déficit sous la barre des 3 % du PIB d’ici à 2027, conformément aux demandes de Bruxelles, au détriment des prestations sociales et des dépenses publiques

 Mis à jour le 28 avril 2024 à 20:26

 L’austérité est, pour le gouvernement de Gabriel Attal, un choix que ne dictent pas les marchés. « On ne réagit pas par des coups de volant à une agence de notation », assurait le député Renaissance Clément Beaune, vendredi, sur les ondes de France Info.

Le même soir, Fitch et Moody’s laissaient un répit à Paris, avec une note inchangée. Cela n’empêchera pas le ministre des Finances, Bruno Le Maire, de présenter ce lundi aux députés un programme de stabilité 2024-2027 aux accents austéritaires.

Ce dernier « sert surtout à présenter des solutions libérales », décrypte le député communiste Nicolas Sansu. Les coupes réglées en préparation sont une « hérésie quand on regarde les chiffres. Car rien n’a changé. On ne peut pas dire qu’on ait réellement un problème de dépenses. Ils font ça pour compenser la perte de croissance », explique le parlementaire qui observe au contraire un problème de recettes « parce qu’on a désarmé fiscalement » l’État.

En 2023, les dépenses publiques ont augmenté, mais à un rythme inférieur à l’inflation. Dette ou pas, la priorité est donnée à la casse du système social. « Plus de 50 % de notre PIB, notre dépense publique, sont déterminés par des choix collectifs : des services publics locaux ou nationaux, la protection sociale. Il y a tout un pan de la richesse qui échappe à la loi du marché. Ils veulent revenir dessus », alerte le député communiste.

A l’origine, des prévisions trop optimistes du gouvernement

Ce lundi, lors du débat d’orientation budgétaire, le gouvernement va donc présenter une trajectoire en vue d’atteindre un déficit en dessous du seuil de 3 % de PIB à l’horizon 2027, conformément aux traités européens. Un véritable tour de vis puisque le déficit public était, en 2023, de 5,5 % du PIB.

« Cette trajectoire annonce une baisse des dépenses publiques et une attaque des prestations sociales sans précédent. Mais, même avec cela, ils savent très bien qu’ils ne seront pas capables d’atteindre l’objectif de 2,9 % en 2027. Une telle réduction de déficit en deux ans ne s’est jamais vue dans un contexte de croissance aussi faible », estime Éric Coquerel, président insoumis de la commission des Finances de l’Assemblée. Selon lui, « ce programme est la marque de l’échec de leur politique ». Échec que les Français paieront.

Eva Sas, députée écologiste et membre de la commission des Finances, craint, elle aussi, que « le rythme d’ajustement de la dette ne soit mortifère », tandis que le président du groupe socialiste Boris Vallaud y voit, lui, « un rythme délirant et injuste », fauteur de « brutalité sociale ». De plus, il sera inefficace économiquement puisqu’une diminution de la dépense publique freine la croissance.

 

En février déjà, lors de la révision à la baisse des perspectives de croissance pour 2024 de 1,4 % à 1 % du PIB, le locataire de Bercy avait annoncé 10 milliards d’euros supplémentaires d’économies. Cela s’était traduit par une coupe de 2,2 milliards dans les crédits alloués à l’écologie. Ainsi, un milliard d’euros a été déduit des fonds pour la rénovation du bâti (MaPrimeRénov’), 341 millions d’euros des infrastructures de transport, 430 millions ont été retirés au Fonds vert. « C’est ce dernier qui finance les changements d’éclairage public, le verdissement des villes », dénonce Eva Sas.

La recherche va perdre 700 millions d’euros, tout comme l’éducation nationale et l’enseignement supérieur. La culture essuie une perte de 200 millions d’euros. Alors que le monde affronte un défi climatique sans précédent, l’aide publique au développement a d’ores et déjà perdu 740 millions de crédits, etc.

La gauche veut taxer les superprofits

Le pire reste à venir. Avec une telle trajectoire de dépenses, il va falloir procéder à 10 milliards de nouvelles économies en 2024 et 25 autres milliards en 2025« Ils veulent mettre les collectivités territoriales au régime sec, s’inquiète Nicolas Sansu. Pourtant, elles interviennent pour zéro dans le déficit puisque leurs budgets sont à l’équilibre. » L’objectif est de les contraindre à livrer certains services au privé.

À cela s’ajoute une réforme de l’assurance-chômage qui permettrait d’engranger 4,2 milliards d’euros sur le dos des privés d’emploi en 2027. « Quoi que l’on pense, la protection sociale était excédentaire en 2017 », réagit Boris Vallaud, qui dit avoir le « sentiment d’être gouverné par des incompétents ».

Nicolas Sansu est inquiet. « En commission des Finances, j’ai demandé au ministre délégué aux Comptes publics, Thomas Cazenave, de nous préciser que l’indexation des pensions de retraite et des prestations sociales sur l’inflation serait maintenue. Il n’a pas voulu nous l’assurer », témoigne-t-il.

Sur les bancs de la gauche, d’autres pistes sont privilégiées. Côté dépenses : « Les exonérations de cotisations sociales sont de 80 milliards d’euros et sont compensées par le budget de l’État. On nous dit toujours qu’il est hors de question d’y toucher », signale Nicolas Sansu. Côté recettes, la gauche, mais pas seulement, fourmille d’idées.

Le président de la commission des Finances Éric Coquerel affirme que « le CAC 40 nous coûte trop cher, notamment en cadeaux fiscaux ». Il estime qu’on peut trouver une majorité au Parlement pour faire voter 43 milliards d’euros de taxes sur les superdividendes, les rachats d’actions, les transactions financières, etc. L’écologiste Eva Sas retient que, depuis 2017, les baisses d’impôts ont entraîné 50 milliards de recette fiscale. « On n’a pas les mêmes pistes de rétablissement des équilibres budgétaires », avance-t-elle.

Le retour à la règle des 3 %

Le programme de stabilité 2024-2027 que présente le gouvernement s’inscrit dans le cadre européen du Pacte de stabilité. Il s’agit de la fameuse règle qui interdit aux États un déficit supérieur à 3 % du PIB et une dette supérieure à 60 % du PIB. Des règles contraignantes qui ne sont quasiment jamais respectées. Le 23 avril, le Parlement européen a voté un assouplissement du pacte qui n’en est pas un.

Car les nouvelles règles fixent une trajectoire de dépense publique sur quatre ans (voire sept ans) pour les États dont la dette excède 60 % du PIB. Les pays dans ce cas se verront contraints de réduire le ratio dette sur PIB de 0,5 % par an en moyenne et de 1 % si la dette est supérieure à 90 % du PIB. Tous les eurodéputés de la gauche française présents dans l’Hémicycle ont voté contre ce texte. Car, cette contrainte est contraire aux objectifs affichés par l’UE, notamment en matière de lutte contre le bouleversement climatique.

Dans un récent rapport qui dénonce les tours de vis budgétaires chez les Vingt-Sept, la Confédération européenne des syndicats estime que, pour répondre à leurs besoins d’investissements sociaux et environnementaux, il faudrait aux États de l’UE dépenser 300 à 420 milliards d’euros par an, soit 2,1 à 2,9 % du PIB européen.

Dans la campagne des élections européennes, les différentes listes appellent à en finir avec l’obsession de l’équilibre des finances. « Nous proposons de remplacer le pacte budgétaire (…) par un pacte social et démocratique de développement durable », avec pour objectif de financer une « nouvelle industrialisation, le développement des services publics et la mise en œuvre d’une écologie populaire », estime-t-on du côté de la Gauche unie pour le monde du travail menée par Léon Deffontaines.

Cela doit s’appuyer également sur une autre politique, en usant de la manne de la création monétaire. De son côté, Marie Toussaint, tête de liste écologiste, prône, elle aussi, le recours à une autre politique monétaire. Selon elle, la conduite de la BCE devrait être « indexée sur plusieurs priorités l’inflation, le plein-emploi, la décarbonation et la transition écologique ».

À l’instar des autres familles politiques de gauche, Raphaël Glucksmann fait d’un impôt sur le patrimoine des riches européens l’une de ses principales propositions de campagne. Les insoumis emmenés par Manon Aubry avancent un plan de bifurcation écologique et sociale, ainsi qu’un cadre économique fondé, non sur les déficits, mais sur des indicateurs de progrès humains. « Avec le Pacte de stabilité, alerte le communiste Nicolas Sansu, on revient sur toutes les avancées collectives que se sont données les peuples, notamment la France. »

  

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :