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Texte d'orienatation (en discussion), adopté le 7 février dernier

Notre époque vit un entre-deux. Angoisse et espoir traversent toutes les sociétés et tous les champs de la vie : les possibilités ouvertes par le développement des connaissances, des sciences et des techniques, par la créativité des humains n'ont jamais été aussi considérables, mais les menaces contre le genre humain n'ont jamais été aussi grandes.

Les aspirations à la paix, à la fraternité, à l'égalité, à la liberté sont devenues les valeurs les plus partagées, individuellement et collectivement ; mais elles sont souvent dévoyées et trahies. Il est possible de développer les capacités humaines collectives grâce à la richesse des individualités ; mais les formes dominantes de pouvoirs, tant politiques qu'économiques ou même symboliques, enferment chacune et chacun dans les contradictions de l'individualisme. Le capitalisme perd fondamentalement sa légitimité aux yeux d'un nombre croissant d'êtres humains. Mais il semble que ce soit par défaut, comme si l'histoire restait paralysée par le bilan de régimes soi-disant « communistes » en Europe de l'Est : le capitalisme restait la seule organisation sociale viable aux yeux du plus grand nombre jusqu'à sa nouvelle crise. Ceux-là même qui en combattent les déchirures, souvent, ne se projettent pas au-delà de ce système.

Les citoyens du 21ème siècle ont la capacité d'avoir la maîtrise du développement de leur société. Mais il faut pour cela rejeter l'idée ressassée par toutes les droites et même nourrie par le social-libéralisme selon laquelle la défense des garanties sociales, des acquis sociaux, est l'ennemie du mouvement, des réformes. Non, les luttes de résistance ne sont pas régressives, arc boutées sur le passé. L'archaïsme est de ne pas permettre que s'épanouissent les compétences humaines : voilà le nœud qui enserre nos existences et nous maintient entre un monde ancien qui disparaît et un monde nouveau qui cherche à naître.

1/ Un monde en crise

Pour la première fois à l'époque moderne la crise actuelle combine de multiples dimensions qui se renforcent mutuellement : rapports de dominations fondés sur des pratiques d'assujettissement, d'exploitation et de dépossession, et ce, dans tous les domaines ; épuisement des ressources non renouvelables ; dévalorisation du travail ; effondrement du modèle de croissance fondé sur la finance. Au total c'est la nature même et les fondements de la mondialisation capitaliste et libérale qui se trouvent mis en cause.

1/1 La finance devenue folle

Pour faire face à la crise du régime d'accumulation fordiste le capitalisme a mis en place un nouveau modèle reposant sur cinq piliers :

- La financiarisation galopante du fonctionnement du capital et le pillage des fonds publics

- la flexibilité et toute forme de surexploitation se traduisant par une modification substantielle de la répartition de la valeur ajoutée au détriment du travail et au profit du capital.

- Le recul des régulations nationales concrétisé entre autres par la privatisation des services publics.

- Le pouvoir absolu des actionnaires dans l'entreprise appuyé sur la libre circulation des capitaux et l'explosion de la sphère financière

- Le libre échange mondial permettant la mise en concurrence des salariés du Nord et du Sud .

Or le libéralisme connaît depuis 20 ans une instabilité chronique marquée par l'explosion de bulles spéculatives successives. C'est le décalage vertigineux entre la production de biens et de services et l'essor de la finance porté par la « titrisation » , les « produits dérivés » et l'endettement massif de l'économie US qui est à l'origine des derniers soubresauts de 2008. Partie de la finance, c'est maintenant « l'économie réelle » qui est touchée avec la récession, les licenciements, le freinage de la consommation et des investissements.

1/2 Une crise sociale au Nord comme au Sud

Au Nord, la remise en cause des conquêtes de l'après-guerre provoquent de graves conséquences sociales : montée du chômage, précarité, dégradation des conditions de travail et de vie, aggravation des inégalités. Les « réformes « libérales appliquées dans la plupart des pays européens ont eu pour objectif de miner les systèmes collectifs de protection sociale et de drainer l'épargne disponible vers les compagnies d'assurance et la spéculation.

Au Sud, si la pauvreté diminue, pour l'essentiel grâce à la croissance chinoise, les inégalités se creusent tant à l'intérieur des pays qu'entre nations riches et pauvres. Les émeutes de la faim auxquelles on a assisté dans de nombreuse régions témoignent des tensions engendrées par l'augmentation du prix des denrées alimentaires et plus largement de l'échec des modèles agricoles imposés par la domination du libre-échange : sacrifice des cultures vivrières au profit des exportations, développement des agrocarburants, matière première comme objet de placements.

Au total près de 50 % de l'humanité est conduit à vivre avec moins de 2,5 dollars par jour.

1/3 Le productivisme épuise la terre et l'homme

A l'évidence la croissance fondée sur une exploitation accrue de la planète a aujourd'hui atteint ses limites. Les études internationales les plus sérieuses montrent que l'humanité consomme de l'ordre de 1,3 fois les ressources renouvelables disponibles. Emissions de gaz à effet de serre, appauvrissement des écosystèmes et de la bio-diversité, pénurie d'eau, pollutions de toute sorte, multiplication des déchets dangereux, maladies liées à l'environnement, épuisement des réserves fossiles constituent autant de menaces sur le présent et l'avenir. Faisant preuve d'un aveuglement sans bornes une minorité de privilégiés s'arroge le droit de priver les générations à venir des ressources planétaires communes.

Face à cela les instances internationales continuent de se limiter aux effets d'annonce et de faire une confiance aveugle dans l'innovation et les mécanismes de marché. A l'inverse la crise écologique nous impose de repenser les rapports entre progrès, science et nature bien au delà de la seule économie.

2/ En France : une droite dure et décomplexée

2/1 L'alignement sur l'Europe libérale

La politique menée depuis un an et demi par Nicolas Sarkozy s'affiche pour ce qu'elle est : un projet autoritaire et néo-libéral visant à mettre la France à l'heure de la mondialisation. En Europe la présidence française a impulsé les mesures les plus dangereuses en matière d'intégration à l'OTAN , de construction d'une Europe forteresse, de protection de l'environnement (paquet climat énergie). La décision de faire revoter les irlandais pour le projet de traité constitutionnel illustre de manière éclairante le mépris de la démocratie et des peuples véhiculé par les élites de la bureaucratie européenne.

2/2 La montée des inégalités et de la précarité

Tandis que le gouvernement mobilise des milliards pour sauver les banques et le système financier, les conséquences de la crise économique frappent durement les salariés : plans de licenciement, augmentation des précaires, des sans logis et des sans papiers. Les projets de démantèlement des services publics (éducation, santé, poste) se poursuivent comme les attaques contre les salaires, les retraites, le temps de travail et de vivre. Le cynisme ne connaît plus de limites avec les annonces sur le travail du dimanche et la retraite à 70 ans.

2/3 Une politique sécuritaire et anti-démocratique

Depuis sa victoire la droite applique un projet visant manifestement à restreindre les libertés : mise au pas de la télévision publique et priorité aux amis du Prince dominant la presse privée, renforcement des pouvoirs du président, domestication du parlement, réforme de la justice accentuant la main-mise du gouvernement, fichage généralisé, utilisation abusive des garde à vues, hausse des reconduites à la frontière.

Cette volonté de répression tous azimut dessine les contours d'une société à la fois autoritaire pour faire taire ceux qui auraient l'audace de se révolter contre les injustices et appuyée sur des tensions permanentes et la peur pour pousser à des comportements grégaires.

2/4 L'absence d'alternative à gauche

Face au rouleau compresseur de la droite, l'ensemble de la gauche est aphone, pris au piège de l'absence de renouvellement de ses analyses comme de son incapacité à formuler une visée alternative au projet libéral. Elle ne réussit pas à mettre au cœur du combat d'aujourd'hui les enjeux internationaux et européens, l'écologie, la démocratie et le rapport à l'Etat, le dépassement de toutes les dominations.

La distorsion entre résistance idéologique d'une partie importante de la société et difficulté de la construction en positif d'une autre vision du monde s'accentue.

Principale force d'opposition, le PS donne le spectacle d'une formation engluée dans des affrontements internes, hésitant entre « modernisation » et alliances au centre avec Ségolène Royal et retour à la tradition « molletiste » avec Martine Aubry. Au final tout le monde s'accorde pour soutenir l'orientation du PSE et le traité de Lisbonne.

En dehors du PS, le repli sur l'identité communiste, révolutionnaire ou Verte rend difficile la naissance d'une construction nouvelle. La faiblesse de réelles perspectives à gauche pèse donc lourdement sur les capacités de mobilisations et de propositions crédibles.

3/ Construire un projet alternatif

En opposition au capitalisme, comme au discrédit de l'action collective portée par l'idéologie dominante, il est nécessaire d'inventer et de construire une alternative émancipatrice, un éco-socialisme autogestionnaire, féministe, et alter mondialiste pour le 21° siècle. Nous souhaitons y contribuer en liant combats au quotidien, propositions transitoires engageant des transformations en profondeur et perspectives d'une société d'émancipation. En ce sens six chantiers sont prioritaires.

3/1 Développer la citoyenneté

Notre objectif est de faire de la démocratie le but et le moyen prioritaire de l'exercice du pouvoir. Il s'agit d'aller vers une citoyenneté toujours plus effective, s'appropriant des pouvoirs qui lui sont pour l'instant extérieurs. Nous souhaitons faire émerger de nouveaux lieux et développer des pratiques de démocratie directe et autogestionnaire dépassant les formes habituelles de délégation de pouvoir.

Cela signifie concrètement ouvrir la voie à une 6° République en affirmant la primauté des droits, du bien commun et de l'intérêt général, en cassant la logique de confiscation de l'information et des pouvoirs, en étendant la démocratie à l'entreprise, en reconnaissant tous les droits civiques et politiques aux étranger(e)s résident(e)s.

3/2 Faire reculer le marché

La marchandisation générale de l'ensemble des activités impose de faire reculer la logique du profit en renforçant et transformant les services publics. Par l'intervention conjointe des salariés et des usagers (qui ne sont pas des clients) et une répartition équitable sur tous les territoires, il faut étendre l'accès aux droits sociaux et à la sphère de la gratuité. Au delà nous souhaitons que se développent des réseaux économiques libérés de l'emprise du capital : commerce équitable, production et échanges locaux, économie sociale et solidaire.

3/3 Changer la place du travail.

Le travail doit-il être la valeur dominante de la vie humaine ou seulement une activité comme les autres ? Nous proposons d'approfondir la réflexion sur la question des ressources et au delà sur la manière d'assurer à chacun(e) des conditions dignes d'existence. Cela passe par les revenus mais aussi par les services publics et la gratuité . De même une protection sociale de haut niveau nécessite de nouveaux financements plutôt qu'une baisse constante des prestations et une contribution croissante des salariés. La redistribution des richesses passe aussi par la hausse des minima sociaux et une refonde complète de la fiscalité permettant une meilleure taxation des revenus du capital et de la propriété.

L'autre urgence porte sur la démocratisation du pouvoir dans l'entreprise par des droits accrus pour les travailleurs, la poursuite de la réduction du temps de travail, une réflexion sur les modalités de découplage entre travail contraint et revenu.

3/4 Aller vers un éco-développement

Au plan mondial, le libre échange doit laisser la place à un « juste échange » intégrant l'impératif de souveraineté alimentaire, la relocalisation des productions et la défense de l'emploi, la solidarité Nord/Sud et l'annulation de la dette des pays pauvres. Une régulation collective devra privilégier les « biens publics mondiaux » (eau, air, santé, climat, éducation...) dont chaque être humain sur la planète doit pouvoir disposer. Il faut changer radicalement nos modes de production, de consommation et de transport. L'indispensable décroissance de l'empreinte écologique globale doit être discriminante : aux plus riches, aux pollueurs, aux gaspilleurs d'accomplir les plus grands efforts.

3/5 Lutter contre les discriminations

L'égalité réelle impose d'agir dans tous les domaines de la vie contre les discriminations liée au sexe , à l'origine ethnique ou géographique, la religion, l'orientation sexuelle, le handicap ou l'âge. Ce n'est pas par le seul biais de la promotion individuelle que reculeront les exclusions sociales et les inégalités territoriales. La lutte est à mener par une action résolue au niveau social, économique et politique pour l'emploi, les salaires, l'accès au logement, aux transports, et aux services publics.

3/6 participer aux luttes féministes

La perspective féministe est au cœur de notre projet. Or les femmes subissent encore violences et inégalités. Des avancées sont indispensables sur le terrain politique par la parité réelle , le non-cumul des mandats et la proportionnelle, économiques avec l'exigence d'une égalité des salaires et de la formation, ainsi que dans l'accès aux carrières professionnelles, sociale avec une politique plus efficace de lutte contre les violences faites aux femmes. De manière plus générale nous sommes favorable aux mobilisations pour conquérir de nouveaux droits et briser les stéréotypes de genre.

4/ Pour une nouvelle force politique

4/1 Les principes

En ce début du 21° siècle, militant(e)s anti-libéraux, environnementaux, alternatifs, alter mondialistes, féministes, syndicalistes sont orphelins d'une expression politique à la hauteur des enjeux. Les formes dominantes du siècle dernier ont échoué. Parmi les tentatives de transformation révolutionnaire certaines ont dégénéré et d'autres ont buté sur leur isolement. Les sociaux- démocrates qui prétendaient dépasser le capitalisme par une accumulation de réformes structurelles se sont massivement adaptés à lui. Les partis Verts qui pensaient incarner à eux seuls un « nouveau paradigme » se sont marginalisés ou rapprochés du centre.

Il faut tirer les leçons de ces échecs en s'engageant dans une vaste reconstruction idéologique et politique. Sur ce chemin quelques éléments peuvent nous servir de guide :

- Un projet alternatif doit être capable de lier émancipation sociale et révolution écologique, défense des intérêts des travailleurs et rupture avec l'accumulation fondée sur le productivisme.

- L'expérience nous montré qu'aucune structure existante ne peut à elle faire bouger les lignes et rassembler autour d'elle. Le pluralisme est donc indispensable comme méthode de regroupement donnant à voir la diversité des forces en mouvement sans étouffer les engagements individuels et sectoriels partie prenante d'un processus ouvert des le départ.

- Une construction originale s'efforcera d'éviter les impasses qui consiste soit à s'enfermer dans la protestation sans jamais prendre la responsabilité du changement au quotidien, soit la pratique purement gestionnaire incapable d'articuler présence dans les mouvements sociaux et travail au sein des institutions.

- La crise de la représentation qui touche l'ensemble des partis s'incarne dans des dérives mortifères : bureaucratisation, autoritarisme et électoralisme l'emportent sur la socialisation, la mémoire et l'ancrage populaire. Nous nous devons de réfléchir à tous les moyens susceptibles de dépasser la coupure entre champ politique et social, d'imaginer des dispositifs produisant des synthèses, des formes de coopération sans subordination avec les composantes diverses des mouvements sociaux.

4/2 Projet de Résolution :

La Fédération, une première étape

Face aux multiples défis du 21ème siècle, une alternative est plus que jamais nécessaire. Il s'agit de rendre possible une transformation radicale en dépassant le capitalisme, de faire bouger les lignes de force à gauche et de rendre possible l'intervention citoyenne.

L'enjeu pour nous consiste à dépasser les clivages traditionnels entre champs politique et social, entre pratique institutionnelle et mobilisation, entre écologie et social. La crise du système capitaliste rend tout à fait urgente cette démarche de construction d'une alternative qui permette de le dépasser et de le remplacer.

Une telle ambition suppose de concrétiser un espace où pourront se retrouver tous les courants et tout(e)s les citoyen(e)s attachés à changer cette société. Mais l'unité ne peut se réduire à des proclamations. Pour donner une réalité, elle doit se démontrer dans des actes politiques.

Convaincre de la possibilité de ce rassemblement prendra du temps et ne sera pas une chose aisée, mais c'est dès maintenant que nous décidons de fédérer nos énergies.

Nous appelons donc à une première étape de rassemblement autour d'une structure provisoire, ouverte et évolutive, s'inscrivant dans un processus qui n'en est aujourd'hui qu'à ses premiers balbutiements.

Nous prenons donc l'initiative du lancement d'une convergence dont le titre sera « La Fédération .

Il s'agit pour les mois de 2009 de traduire notre point de départ, les éléments qui font accord et qui nous permettent de construire des propositions inscrites dans les débats et l'activité politique et sociale.

Bien entendu ce premier constat ne résume pas à lui seul l'ensemble des dimensions d'un projet d'émancipation : le féminisme, l'altermondialisme, la lutte contre les dominations.. font aussi partie intégrante de notre identité.

L'enjeu est donc d'assumer pleinement le pluralisme dans les pratiques, les approches idéologiques et les déterminations sociales. C'est même la condition pour bâtir un arc de forces à même de traduire dans le champ politique la diversité et la richesse des résistances, des remises en cause et des tentatives pour faire bouger au quotidien une société profondément inégalitaire et aliénante. A travers ses activités et l'organisation de débats, nous nous efforcerons de bâtir de nouveaux repères culturels.

La Fédération ne prétend pas être seule la force de transformation ni le noyau autour duquel elle se construira, pas un parti de plus mais une dynamique pour commencer à donner une matérialité à une formation d'un type nouveau.

Tag(s) : #Tracts, déclarations et pétitions
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